A la base du cidre, la pomme...
Elle est cultivée dans des vergers.

1. LA « CUEILLAISON » ou récolte des pommes :

AVANT
Les pommiers sont « lochés » ou gaulés avec un e longue perche en bois, une « vôle », munie d’un crochet pour secouer les branches. Cependant, les pommes n’étaient pas ramassées une par une, mises dans un récipient, puis versées dans une « pouche » comme aujourd’hui. « Rêquer » constituer à faire tomber les pommes qui restaient sur l’arbre après être « loché ». Sous les pommiers, étaient tendues des bâches ou des filets sur lesquels les fruits tombaient ainsi que les feuilles, la mousse et les petites branches. Le tout était ramassé au moyen de la pelle ou de la fourche à pommes et par un mouvement de va-et-vient, il ne restait plus que les pommes, le reste du contenu passant à travers la tige de fer.

Les pommiers étaient généralement plantés dans les terres à cailloux, utilisées aussi pour les petites cultures, comme le seigle.

Il fallait gauler avant le gel. Les pommes ramassées étaient engrangées pendant un certain temps ; on attendait qu’elles soient parfaitement « parée », c’est à dire mûres.
Avant le gaulage, les pommes tombées pendant la nuit étaient récupérées. Cela s’appelait ramasser la « guête ».
Le « jour du cidre » était souvent pendant la période de « décours », de décroissance de la lune.

MAINTENANT
Le verger : La base essentielle pour pouvoir faire du cidre. Un verger commence à produire au bout de 5 ans.
La quantité de pommes données par un arbre est variable en fonction de la variété mais peut être de 300 kg.

Le ramassage des pommes est l'opération la plus pénible physiquement mais c'est

une étape incontournable.
les pommes sont stockées dans des sacs en toile de jute ou des sacs de pommes de terre... Elles sont entreposées soit à l'intérieur (grenier, hangar, ou en extérieur, sur une dalle de béton). Ces pommes doivent être utilisées "à bonne maturité".

L'entretien du verger avant le ramassage est important, il faut que la pelouse soit rase pour faciliter le ramassage. Un terrain plat est plus adéquat mais c'est loin d'être toujours le cas.
Le tri des pommes est important. Il est nécessaire d'avoir des pommes à bonne maturité. Si elles sont trop avancées, les pectines sont dégradées ce qui compromet l'opération

Il est nécessaire de faire un mélange de différentes variétés de pommes. Ce mélange conditionnera le caractère du cidre. L'expérience montre que les différentes variétés de pommes, leurs proportions et même la variété des vergers que l'on a pu utiliser, font varier très fortement la qualité et la tenue du cidre. Enfin, chaque millésime est différent et comme nous sommes des amateurs, d'une année sur l'autre nous n'obtenons pas la même qualité de cidre. Pour la production industrielle, il existe des procédés qui leur permettent de fabriquer des produits trés réguliers.

En fait, on assemble 3 grands types de pommes, les variétés douces, les douces amères et les acidulées. Ensuite, le producteur choisit les proportions de chacun pour obtenir un équilibre sucré, acide et amer.


2. LE PILAGE :

Les pommes étaient versées dans le grugeoire à main où elles étaient écrasées. A la base de cette trémie, se trouve un broyeur actionné par une manivelle. La pulpe était recueille dans un récipient, puis versée sur la claie du pressoir, reposant sur le tablier ou maie.

Avant le broyeur mécanique, était utilisée la meule pour « gruger » actionnée par un cheval. La « gatée » est l’auge circulaire du pressoir dans laquelle une roue en pierre écrase les pommes qui étaient ramassées avec la pelle à marc, puis placées sur le tablier du pressoir.

Dans chaque ferme, même de moyenne importance, tout un bâtiment était réservé pour le pressoir et la meule. D’ordinaire, les pommes étaient conservées au premier étage et une trappe faite dans le plancher permettait le passage des pommes qui tombaient directement dans le milieu de la meule, appelé la « croisée ». Le brasseur y prenait par pelletées les pommes et les jetait dans le tour, auge circulaire en pierre.

Après être « grugée », broyées, les pommes étaient pressées. Sur un plateau en bois de 5m sur 6, un lit de pommes de 15 à 20cm de hauteur était dressée puis recouvert d’une couche de paille « la glu », tressé pour empêcher le marc de « chier » de déborder ; puis, une nouvelle couche de pommes était constituée, puis une autre de paille … jusqu’à environ un mètre de hauteur.

Sur le tout, un plateau fait de planche était installé. « Hâler le marc » était le terme employé pour désigner cette opération qui consiste à dessécher la pulpe, à lui rendre le jus. Sur ce plateau, vient reposer l e « plochon », le « mouton » qui est une poutre de chêne qui, avec l’aide d’une vis en bois, fait pression sur le tas ainsi constitué. Il fallait attendre deux ou trois heures avant de descendre la presse de quelques centimètres. Le jus s’écoulait au fur et à mesure d’une rigole faite sur le plateau dans un récipient réservé à cet effet. Avec un seau ou un « pucheu », il était transvasé dans les tonneaux.

Le lit de marc pressuré avec la paille, avait tendance, sous l’action du plateau, à s’évaporer, à déborder. Le coupe-marc permet de couper à ras, d’égaliser. Certains sont à main ; d’autres actionnés avec le pied.

Lorsqu’il s’agissait d’un pressoir à « cage », il fallait de même monter le marc. Cependant, la paille n’est pas nécessaire puisqu’il est prisonnier dans la cage ronde ou carrée. Quand le marc était monté, était placés des plateaux de bois appelés « billots » ou « cales » ; puis, à l’aide d’une longue perche, la vis sans fin d’un pressoir était serrée progressivement.

Le jus coule lentement à travers un filtre, après être passé par les rigoles ménagées au pourtour du pressoir et remplit le « bellon », baquet de bois.

La pelle en bois sert pour râcler le marc au fond du pressoir. Elle doit être en cette matière et non en tôle qui s’oxyde. En effet, la formation de sel de fer présente des risques d’intoxication et peut donner un goût désagréable et une couleur au cidre.

La qualité :

Afin d’obtenir un cidre avec un degré d’alcool important, le paysan mélangeait du cidre de l’année précédente avec la nouvelle récolte. C’était du cidre « greffé ». Pour l’empêcher de durcir, était versée une couche d’huile d’olives. Il était également employé un produit dénommé « conservateur », vendu en pharmacie.
Les tonneaux en chêne étaient soigneusement lavés avec de l’eau chaude dans laquelle on avait fait bouillir du genièvre et des feuilles de pêchers. Plusieurs fois rincés, ils étaient soufrés avant d’être entonnés.

La « boisson », le « petit bère » ou le « petit mitoyen », mélange de cidre et d’eau, était servi tous les jours. Dans le Pays de Caux , la « béchon » désigne le liquide obtenu à partir du marc trempé pendant une nuit dans de l’eau et la « petite eau », celui qui est obtenu après plusieurs macérations.

Le cidre pur « gros bère » en patois cauchois, conservé en fûts et également le cidre bouché ou « paré » étaient réservés pour les jours de fêtes et les jours fériés, le repas se terminant par un « larmé » de pommé, eau de vie de pommes ou de poiré, eau de vie de poires distillée par le bouilleur de cru, de « calva », « goutté », ou « blanche », noms qui désigne l’eau de vie de cidre.

Avec les « chettes », les premières pommes qui tombent, les précoces, pilées en août-septembre, il est confectionné de la « piquette » qui permet de faire le lien avec le vrai pilage d’hiver qui peut durer pendant deux mois.


3. LE STOCKAGE

Le stockage se fait en 2 temps. Pour commencer, le jus de pomme est mis en barrique ce qui permet un repos du jus.

Les premières fermentations sont activées.
Traditionnellement, la clarification du moût se fait après plusieurs semaines à basse température. Il se forme un coagulum (matière pectique et calcium) qui se précipite au fond de la cuve. Le CO2 dégagé par la fermentation alcoolique entraîne le coagulum vers le haut de la cuve formant ainsi le "chapeau brun". On obtient donc un jus clarifié et dépectinisé : les lies au fond de la cuve et le chapeau en haut de la cuve. On peut alors procéder au soutirage. On emploie une pompe pour soutirer dans une autre cuve.
Pour la fermentation dans des fûts-bondes, le cidre doit être préservé contre le contact de l'air, cependant il faut que l'acide carbonique produit par la fermentation puisse se dégager. On utilise pour cela la Bonde Noël ou la Bonde Bourguignonne permettant la sortie du gaz carbonique de la cuve tout en empêchant l'entrée de l'air. On peut également employer une bonde ordinaire.
Après la fermentation en fûts, on opère un second soutirage pour éliminer les lies résiduelles et obtenir une limpidité absolue.
Après tout cela, le cidre est mis en bouteille au stade de fermentation et de densité souhaitée, selon que l'on veut obtenir un cidre doux, demi-sec ou brut.
Le jus obtenu à la sortie du pressoir titre aux environs de 1055 grammes par litre.
Le jus est placé dans un tonneau sans levure, le jus ayant les siennes de façon naturelle. Ces levures naturelles sont normalement présentes sur les pommes. Ce sont elles qui donnent bon goût au cidre.
Elles se développent à froid ; il ne faut donc jamais mettre le tonneau à fermenter dans une étable avec les animaux.
L’air étant l’ennemi du cidre, le tonneau doit être toujours tenu plein ou " ouillé " pour éviter la fermentation acétique.
Au bout de 3 à 4 jours, la première fermentation " dite tumultueuse " se d’éclanche.
Une sorte de boudin de mousse sort de la bonde.
Une deuxième fermentation suit ; elle est beaucoup plus lente.
Afin de ne pas donner un mauvais goût au cidre, il convient de peser régulièrement le cidre et de "ouiller" le tonneau avec du jus pasteurisé.
Lorsque la densité est descendue à 1025 grammes par litre, on soutire le cidre en fabrication dans un tonneau plus petit à l’aide d’un tuyau attaché à 3 cm de l’extrémité d’une latte en hêtre que l’on descend, très lentement afin de ne pas remuer le cidre, jusqu’à toucher le fond.
L’opération de soutirage ralentit la fermentation qui continue à faire baisser la densité.
Lorsque la densité du cidre atteint les 1018 grammes par litre, on met le cidre en bouteilles.
Le tonneau est alors muni d’une cannelle et les bouteilles, de type " bouteille de Champagne ", sont remplies jusqu’à 5 cm du goulot et bouchées immédiatement avec un bouchon en plastique.
Le lendemain, les bouchons sont sertis avec des fils de fers spéciaux ou des muselets.
Ce cidre à 1018 grammes par litre est doux et se marie magnifiquement avec des crêpes de sarrasin, le pain sans levure des pauvres d’antan, qui se cuisait dans des tuiles, sorte de poêle en fonte épaisse de 6 mm, d’un diamètre de 35 cm utile et relevé sur le bord d’un petit centimètre.
Au-dessous d’une densité de 1018 grammes par litre, le cidre devient de plus en plus sec et peut aller jusqu’à l’ultra sec pour les amateurs avertis.
Le cidre s’ouvre d’autant mieux qu’il a été soutiré avec moult précautions et qu’il a été bien refroidi. Une fois la bouteille ouverte, il faut servir 6 verres et ne relever la bouteille que lorsqu’il ne reste pratiquement plus que le fond.
Il titre en moyenne ses 5°.
Contrairement à la réputation du cidre, ce cidre " naturel " comme on le fabriquait d’antan se conserve très bien de longues années; L’expérience a été réalisée à Traleprat sur des bouteilles de 17 ans d’age, un régal.
Le petit secret de leur longévité réside dans leur conservation " bouteilles debout ".
Le cidre est ensuite mis en bouteille, au moment où la fermentation s'est interrompue. On ne peut utiliser que les 2/3 de la barrique. Le fond contient des dépôts... Le reste est alors utilisé pour la fabrication de l'eau de vie.

Le cidre est mis en barrique...
Puis en bouteille.

Il existe 3 systèmes de fermeture, le bouchon plastique ou en liège, fixé par un lien métallique. Ce système est moins coûteux (20 à 30 centimes pièce) mais doit être remplacé chaque fois.

Le système de bouchon mécanique est plus coûteux mais ne nécessite que le changement du joins en caoutchouc (10 centimes pièce).
Enfin, le capsulage, qui nécessite un appareil spécial .Ce procédé donne un produit au goût différent de celui conditionné avec un bouchon mécanique.

 

LES PRODUITS DERIVES


La fabrication permet de faire des produits dérivés tel que le lambic. Pour cela, il faut posséder un droit de bouillir qui n'est plus transmissible ou payer ce droit. Ensuite, il faut contacter un distilleur.

Apres la fermentation en barrique pendant 1 à 2 mois, on ne peut soutirer que les 2/3 de la barrique, l'autre partie étant chargée d'impuretés. C'est ce dernier tiers que l'on utilise pour l'eau de vie ou lambic. On utilise alors un alambic où est chauffé le mou qui dégage des vapeurs d'alcools et d'eau. Ces vapeurs passent dans un "serpentin" pour être refroidies et se recondenser. Le restant, appelé "petit lait" est rejeté.
Le distillateur est la personne qui possède un alambic. Il s'agit d'un appareil qui chauffe le "mou" et qui distille l'alcool dans un alambic. Contrairement aux idées reçues, le bouilleur de cru est la personne qui dispose les droits. En effet, si la législation sur la fabrication du cidre est relativement souple (seuls le transport et la vente sont soumis à la législation), la fabrication de l'eau de vie est régie par des règles draconiennes. Il faut posséder des droits de bouillir qui ont été accordés à nos grands parents mais qui ne sont pas transmissibles... La fabrication traditionnelle de l'eau de vie par des particuliers est donc une activité qui est vouée à disparaître. Il est possible cependant de payer ce droit (environ 100 francs les 100°).


On peut aussi faire du vinaigre de cidre... Il faut, au départ, "une mère", qui se transmet d'une personne à l'autre par division. Il faut placer le tout dans un vinaigrier... Le temps fait le reste.

Le vinaigre est obtenu à partir du cidre que l'on laisse vieillir au contact d'une mère dans un vinaigrier. On obtient alors un produit aussi acide que celui du commerce mais avec un goût spécifique. Il peut être utilisé comme tous les autres vinaigres.

Le vinaigrier est une sorte de cruche en gré équipé d'un petit robinet pour soutirer le vinaigre. Ce robinet en bois doit être débouché et remplacé de temps en temps car le vinaigre arrive à l'attaquer. L'étanchéité ne se fait plus.

La mère de cidre se présente sous forme de galettes gélatineuses et flasques. Elle se développe à température ambiante.

La mère est un amas de cellules qui décomposent le cidre pour le transformer en vinaigre. La mère se présente sous forme de galettes. Comme toute forme de vie, elle se développe, prend de l'ampleur; il est nécessaire de la réduire de temps en temps.

La durée, avant d'obtenir le vinaigre est variable, en fonction de la saison, de la température. Plus le vinaigre reste dans le vinaigrier et meilleur il sera. Une fois à point, on le soutire par le petit robinet. on peut soutirer au fur et à mesure. Dans notre cas, nous soutirons de temps en temps une ou 2 bouteilles que nous filtrons à l'aide d'un filtre en papier ou d'un "chinois"(ustensile de cuisine avec une grille à mailles trés fines).

Dans le fond du vinaigrier, déposer une jeune mère. S'en procurer une auprès d'une personne qui produit déjà son vinaigre. Toute les mères ne se valent pas, il est important de transmettre les "meilleures mères" pour ne pas les voirs disparaître au fil des générations. Pour commencer, il ne faut pas mettre trop de cidre, il faut que la mère s'implante dans son environnement, se développe..

Le nettoyage

Des barriques :
Il est nécessaire de bien nettoyer les barriques. Lorsqu'elles ne sont pas remplies, il se développe toute une flore bactérienne nuisible. l'idéal est de les nettoyer à la soude avec de l'eau chaude. Diluer une solution à base de cristaux de soude (3 à 4 kg pour 100 litre d'eau). laisser tremper 48h en roulant le tonneau plusieurs fois par jour pour imprégner tout le bois. Rincer soigneusement 2 fois à l'eau claire puis avec une solution composée de 150 g d'acide citrique pour 25L d'eau (neutralisation de la soude résiduelle). Laisser égouter, bonde en bas, pendant une semaine. Ensuite, faire brûler une mêche de soufre (10g par hl de capacité) introduite dans la barrique.

Des bouteilles:
Le nettoyage des bouteilles vides est très important aussi. Il faut les laver après utilisation.
Une désinfection à la soude est recommandée. Ne pas oublier de leur passer un "petit coup d'eau" juste avant de les réutiliser afin d'éliminer la poussière qu'elles ont accumulée au cours de l'année. Cela permet de vérifier l'état des bouteilles, et du système de fermeture pour les bouchons mécaniques.Ne pas hésiter à changer les joints.
Lorsque les bouteilles en sont équipées, pour le stockage des bouteilles vides, reposer juste le bouchon dessus pour éviter, entre autre que les insectes ne puissent y pénétrer. Ne pas les refermer complètement pour permettre un minimum d'aération.


VOCABULAIRE

Le pic : permet de gauler les pommiers ou de tirer les branches abîmées des arbres. Un long manche est fixé dans la douille.


Broyeur à pommes circulaire :
les pommes étaient écrasées par la roue pivotante autour d’un axe. Elle était mue par un cheval ou un mulet. La quantité de fruit suffisante pour garnir l’auge du tour, profonde d’une trentaine de centimètre, et faire ce qu’on nomme une « pilée » est habituellement d’une centaine de kilogrammes.


Coupe-marc : le marc est donné aux animaux de traits ou aux moutons ; il servait comme engrais au pied des arbres et même comme combustible